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N°488 - Mai/juin 2024
Le pouvoir de l’intelligence artificielle : révolutionner la performance des matériaux et des procédés dans l’industrie*
L’intégration de l’intelligence artificielle (IA) dans la science des matériaux offre des avantages révolutionnaires, comme l’accélération de la découverte de nouveaux matériaux et des analyses approfondies des comportements des matériaux. Cependant, cela soulève des préoccupations telles que l’opacité des algorithmes, la sécurité des données et le risque de disparités socio-économiques. Naviguer dans cette nouvelle ère exige une approche éthique et collaborative, en mettant l’accent sur la transparence, la sécurité des données et le développement équitable des compétences pour maximiser les bénéfices de l’IA tout en atténuant ses risques potentiels.*
Plus sérieusement, l’IA appliquée à la conception de nouveaux matériaux est un concept innovant. Elle l’est déjà moins dans le domaine des procédés, où on l’utilise couramment en recherche pour la construction de modèles et/ou simulations, ou en production pour le contrôle.
Si elle offre de nombreuses possibilités, telle que l’accélération du processus de découverte de nouveaux matériaux grâce à des algorithmes avancés et des techniques d’apprentissage automatique, ou l’analyse approfondie grâce aux simulations atomistiques ou aux prédictions macroscopiques, pour ne citer qu’elles, l’IA ne résout pas tous les problèmes.
Trois principaux sujets sont à mettre en regard de cette accélération exponentielle : la fabrication et la caractérisation des matériaux issus de ces prédictions, les données, et les enjeux sociétaux liés aux grands modèles d’apprentissage.
S’il peut sembler vertueux de prédire les matériaux à cibler plutôt que de générer d’immenses plans d’expériences, il ne faut pas perdre de vue qu’aujourd’hui, les dispositifs de synthèse et de caractérisation haut-débit sont rares, voire inexistants. De plus, rien ne pourra remplacer la validation expérimentale, et la connaissance des experts métiers.
Pour atteindre un niveau de prédiction acceptable, les modèles nécessitent des quantités gigantesques de données fiables et pertinentes, qu’il faut générer (et valider), stocker (quid de la confidentialité ?), puis entrer dans les modèles.
Le monde commence à découvrir les petites mains de l’AI, payées quelques centimes par données qu’elles saisissent dans le domaine : on n’envoie plus les enfants dans les mines (ouf !), on leur fait saisir des données 18 heures par jour pour alimenter les IA… Et je n’aborde même pas le bilan carbone de tous ces calculs !
L’IA peut certainement accélérer les découvertes en science des matériaux, moyennant que l’on s’oriente vers des IA frugales, capables de travailler avec peu de données, mais l’IA ne remplacera pas les experts du domaine. Gageons que cela sera plutôt un nouvel outil aux services des experts pour aller plus vite et être plus robuste dans nos développements.
*Avec l’aimable collaboration de ChatGPTMarjorie Cavarroc, ingénieur R&T TTS voie sèche, experte senior, Safran Tech
Dossier : Intelligence artificielle - Technique - Flashback -
N°487 - Mars/avril 2024
La tribologie, un atout pour répondre aux défis actuels
Le terme tribologie est apparu dans la décennie 1950 et désigne la science du frottement et de l’usure. Mais dès l’Antiquité, les Egyptiens utilisaient des lubrifiants, et les Romains avaient pris conscience qu’une sollicitation répétée, fût-elle minime, pouvait user les matériaux les plus durs.
Pourtant, en 1953, quand le fondateur du groupe HEF quitte son emploi pour créer une société développant des traitements de surface, l’usure est encore considérée dans l’industrie comme normale. Quand une pièce est usée, on la remplace. À quoi bon dépenser de l’argent dans des revêtements retardant l’usure ?
Soixante-dix ans après, bien du chemin a été parcouru : HEF est passé de 2 à 3 500 personnes. L’approche tribologique permet aujourd’hui de choisir ou d’optimiser les traitements de surface pour répondre aux défis actuels tels que la sobriété énergétique, la décarbonation ou les problématiques de santé et d’environnement. Les Journées tribologie et traitement de surface (J2TS) organisées au CETIM en novembre dernier ont été l’occasion de traiter ces différents thèmes, dont certains sont abordés dans ce numéro. Vous pourrez y lire que des traitements traditionnels ont réussi une mutation afin d’éliminer les composants toxiques et s’inscrire dans une logique d’économie circulaire, tout en restant performants et compétitifs.
On parle souvent d’abaisser le frottement ; mais celui-ci est intéressant lorsqu’il s’agit de freiner. Là aussi, les traitements de surface prouvent leur utilité afin de maîtriser les émissions de particules, dont certaines se révèlent particulièrement nocives.
Qui dit frottement, dit souvent lubrification. Les traitements de surface ont un rôle à jouer, que ce soit pour retenir le lubrifiant, assurer un frottement bas en cas de rupture du film d’huile, ou interagir avec les additifs. Ce dernier point est un vrai défi tribologique car les fabricants d’huile ou de graisse gardent souvent jalousement le secret de leur additivation. Le troisième article du dossier traite de cette compatibilité.
En ouverture des J2TS, M Plint (Phoenix Tribolgy) avait conclu par une question : avec la fin du moteur thermique (et du contact lubrifié dans l’injection et la distribution), y aura-t-il encore autant besoin de tribologie demain ?
La réponse ne fait aucun doute. La maturité des films DLC a permis l’introduction de lubrifiants à plus basse viscosité. La mobilité électrique soumet ses engrenages et transmissions à des vitesses de rotation très élevées. Les éoliennes marines opèrent dans des conditions extrêmes de turbulence et de salinité. Que ce soit avec l’arrivée de l’hydrogène comme carburant décarboné ou dans les centrales nucléaires de nouvelle génération, il va falloir investiguer le frottement dans des milieux très particuliers, encore peu explorés. Il y aura donc encore de nombreux défis tribologiques à relever pour les décennies à venir.Yves Gachon, Responsable équipe tribologie IREIS
Dossier : Surfaces et tribologie - Technique - FlashBack -
N°486 - Janvier/février 2024
La recherche et l’industrie au service de l’environnement
Le monde de l’entreprise, tous secteurs d’activité confondus, est en permanente évolution et doit sans cesse innover afin de rester compétitif au sein d’une économie mondiale qui ne connaît plus de frontières. Ce constat est une évidence en ce qui concerne le domaine des matériaux et des traitements de surface.
Ceux-ci doivent répondre aux défis scientifiques et technologiques majeurs du XXIe siècle, notamment au regard de la transition énergétique, de l’industrie zéro carbone, de la sauvegarde de l’environnement, pour ne citer que quelques-uns des objectifs de développement durable, ceux plus particulièrement concernés dans Traitements & Matériaux.
Ainsi, la solution hydrogène qui paraît si simple au premier abord – produire de l’hydrogène principalement à partir d’eau, puis s’en servir comme vecteur d’énergie voire comme carburant – se heurte d’ores et déjà à des obstacles qui nécessitent encore des efforts de recherche soutenus, qu’il s’agisse de la production « verte », du transport ou encore du stockage de l’hydrogène, sans parler de l’acceptabilité sociétale. Ces efforts doivent concerner toutes les facettes de la filière, et les enjeux en termes de matériaux et de traitements de surface y sont considérables.
Matériaux et traitements de surface qui sont également confrontés à des réglementations de plus en plus strictes quant à l’utilisation et la mise en œuvre de substances potentiellement dangereuses pour l’homme ou pour l’environnement. Là encore, l’innovation est indispensable pour mettre au point et développer des solutions alternatives aux procédés actuels visés par ces réglementations et maintenir la compétitivité des entreprises françaises dans ces domaines, sans rupture de production. Ces solutions innovantes devront donc, autant que possible, être intégrables dans les chaînes de production existantes.
Le dossier de ce numéro de Traitements & Matériaux aborde ce nécessaire besoin d’innovation à travers plusieurs défis. Tous ces défis interdépendants devront également faire face et s’adapter à une évolution numérique galopante. L’intelligence artificielle et la simulation sont désormais des outils incontournables. La terminologie idoine du futur reste sans doute à imaginer et dépendra des domaines et des applications, ainsi que de l’usage qui sera fait de ces futures innovations.
Finalement, on ne peut que constater que ces évolutions ne pourront se réaliser sans une synergie de recherche entre les acteurs du secteur économique et les laboratoires de recherche. La formation, qu’elle soit initiale ou continue, sera également un élément essentiel de cette équation complexe mais passionnante de l’innovation, car c’est bien d’elle que naîtront et grandiront les compétences dont nous aurons besoin demain.Karim BOUDEHANE, Rédacteur en chef
Dossier : Les solutions durables dans le traitement de surface - Technique - Flashback -
N°485 - Novembre/décembre 2023
Traitements & Matériaux lance son nouveau site web
Après des mois de travail, Traitements et Matériaux est heureux de vous annoncer le lancement de son nouveau site internet. Plus ergonomique, agréable et rapide, son moteur de recherche puissant vous permettra de naviguer au sein des archives de la revue.
Les différentes rubriques reflètent le contenu du magazine : actualités, articles organisés selon les deux grandes thématiques de la revue que sont les matériaux et les procédés, salons, et bien sûr tous les anciens numéros. Depuis plusieurs décennies, Traitements et Matériaux se veut le reflet de l’activité des industriels dans l’ingénierie des traitements de surface et du traitement thermique, des matériaux métalliques pour les professionnels de l’industrie. Ses innovations, ses problématiques. Actuellement, l’industrie manufacturière est confrontée à un défi majeur : répondre aux normes environnementales croissantes tout en maintenant une performance de haut niveau. Dans ce contexte, les dernières avancées en traitement de surface et traitement thermique sont cruciales, car elles offrent des solutions technologiques innovantes pour préserver les ressources tout en continuant à proposer ses produits de qualité.
Les techniques de revêtement nanocéramique, par exemple, ne se contentent pas de fournir une protection efficace, mais elles le font tout en réduisant l’impact sur l’environnement. En éliminant les solvants nocifs et en réduisant la consommation d’énergie, elles contribuent à réduire les émissions de CO2. De plus, la personnalisation des revêtements de surface grâce à l’impression 3D peut permettre une utilisation plus efficace des matériaux, réduisant le gaspillage. Dans le traitement thermique, l’approche est la même au regard des contraintes environnementales. Les techniques de chauffage assisté par laser réduisent la consommation d’énergie, limitant ainsi l’empreinte carbone de ce processus essentiel. La précision accrue de ces techniques signifie moins de pertes thermiques.
L’intelligence artificielle et l’apprentissage automatique, qui optimisent les processus de traitement thermique, contribuent également à réduire les déchets. Les ajustements en temps réel garantissent que chaque pièce est traitée de manière optimale, minimisant ainsi les erreurs qui entraînent souvent le gaspillage de matériaux. Ces solutions novatrices pour l’industrie manufacturière répondent aux contraintes environnementales croissantes. Les entreprises qui investissent dans ces technologies font d’une pierre trois coups : elles réduisent leur impact sur l’environnement, améliorent leur rentabilité et renforcent leur réputation. Nous vous donnons rendez-vous sur le site pour découvrir comment les articles de nos auteurs abordent ces sujets : www.traitementsetmateriaux.fr.Karim BOUDEHANE, Rédacteur en chef
Dossier : Surfaces et revêtements - Technique - Flashback -
N°484 - Octobre 2023
Des solutions moins énergivores
Les fours industriels sont des moyens de production énergivores et polluants. Pour atteindre la neutralité carbone, des objectifs de réduction des rejets de gaz à effet de serre ainsi qu'une baisse des consommations énergétiques
seront nécessaires.
Les fours sous vide, et encore plus, les fours sous vide multi chambres permettent d'atteindre ces objectifs. Sur un cycle de traitement thermique depuis la chauffe jusqu’au refroidissement rapide ou trempe, les différentes technologies utilisées aujourd’hui pour chauffer et refroidir ont des effets différents sur la consommation et sur les GES : électrique ou gaz pour la chauffe, four atmosphérique ou four sous vide pour le traitement thermique des aciers à haute température, briques réfractaires ou fibres isolantes pour l’isolation des fours.
Dans les cas d’une cémentation, une température de travail supérieure permet la diminution du temps de cycle et des gains énergétiques importants. Pour une profondeur de cémentation de 1mm, sur un acier avec 0,2 % de C, le temps de cémentation est réduit de 4 heures par rapport à un four briqueté. Le gain énergétique induit est de 0.65 kwh/kg traité soit 39 % inférieur à un four continu.
La quantité de rejet de GES est diminuée de 89 %. Une trempe au gaz haute pression demande beaucoup d’énergie (env. 300 kw) sur une courte période (5 minutes) pour entraîner les moteurs de trempe, mais elle supprime l’opération de lavage.
Pour chauffer l’eau de lavage, pour les brasseurs et filtres, une machine à laver consomme 60 % de plus d’énergie que les moteurs électriques pour la trempe.
Enfin les fours mono ou multi-chambres ont une consommation d’énergie très inférieure puisque le four est maintenu à la température de process. La masse à chauffer est donc seulement la masse de la charge. Dans des cycles de brasage sous vide, le gain est supérieur à 40 %. On le voit, les solutions existent, à chacun de les implémenter au mieux.Patrick POULOUX, Directeur commercial France, ECM Technologies
Dossier Fours & Équipements - Technique - Flashback -
N°483 - Septembre 2023
Les traitements thermiques au cœur de la concurrence
Cémentation, carbonitruration, nitruration, bainite, martensite, austénite résiduelle… Des traitements et des structures que tout le monde connaît et qui sont pourtant au cœur des dernières innovations des traitements thermiques et thermochimiques présentées dans les congrès internationaux. L’optimisation des procédés améliore les caractéristiques mécaniques, la résistance à la fatigue et la résistance à l’endommagement des pièces traitées. Cette augmentation des performances permet de faire face aux sollicitations en service de plus en plus importantes dues, en particulier, à l’allégement des organes mécaniques que nécessite la réduction des émissions de CO2. Les solutions retenues doivent, de plus, être compatibles avec des milieux plus agressifs (corrosion) ou fragilisants (hydrogène). Les évolutions portent principalement sur l’obtention d’une austénite résiduelle stable thermiquement permettant, sous l’effet d’une contrainte mécanique, d’obtenir une martensite très fine n’engendrant pas de fragilité. Pour stabiliser cette austénite, plusieurs moyens sont employés comme le traitement de carbonitruration à forte teneur en azote, la transformation bainitique d’aciers faiblement alliés éventuellement cémentés ou carbonitrurés ou le Quenching and Partitioning de pièces de plus en plus massives. De nombreuses recherches portent également sur les traitements de nitruration pour maîtriser les configurations, la nature et l’épaisseur des couches de combinaison, leur porosité et la présence de carbures ou de carbonitrures dans la couche de diffusion. Cela n’est rendu possible que par une maîtrise des flux de diffusion du carbone et ou de l’azote. Les progrès de la simulation et de la modélisation des traitements thermiques permettent de préciser les gammes de traitement, d’anticiper les caractéristiques finales, les contraintes résiduelles et les déformations. Les traitements thermochimiques sont désormais intégrés dans les logiciels couramment employés par les laboratoires et les industriels. D’autre part, les derniers développements de la simulation de l’environnement lors de la trempe utilisant les logiciels CFD (Computational Fluids Dynamics) indiquent l’évolution des contraintes thermiques subies et les propriétés finales en tout point d’une pièce, dans une charge de traitement. L’enjeu pour les laboratoires et les entreprises françaises est en particulier de réaliser en série ces traitements. L’effort est considérable car cela nécessite une remise en cause des gammes, des matériels et des compétences. Cela participera au succès d’une confrontation avec une concurrence désormais planétaire.
Marc Buvron, Chargé de projets au pôle matériaux métalliques et surfaces du Cetim
Dossier : Traitements thermiques et thermochimiques - Technique - FlashBack -
N°482 - Mai/juin 2023
Fabrication additive et hydrogène : deux atouts pour la France
De nombreux industriels français se sont engagés dans l’aventure de la fabrication additive et de l’hydrogène, qu’évoque ce numéro, avec le soutien d’une politique industrielle publique ambitieuse. Maintenir la France et l’Europe en position de leaders technologiques et industriels sur ces sujets est essentiel. La France dispose d’atouts pour ces deux programmes. Les caractéristiques de la fabrication additive la destinent aux fabrications de petites ou moyennes séries à haute valeur ajoutée, pour des applications notamment dans les industries spatiales, aéronautiques ou médicales. La France y occupe des positions très fortes. Il existe par ailleurs une filière française de production de poudres, historiquement développée pour des applications militaires, et qui bénéficie là de débouchés nouveaux. De même, le tissu industriel français recèle des atouts déterminants pour la filière hydrogène. Le groupe Air Liquide dispose d’une expertise de plus de soixante ans en matière de technologie de production et distribution, de sécurité, de réseaux, d’usages, et son activité de Recherche et Développement est majoritairement basée en France. D’autres acteurs tels que Total Energies, EDF, Engie, CEA, Alstom, McPhy, John Cockerill, Forvia ou Michelin développent des stratégies volontaristes pour développer la production et la distribution d’hydrogène ainsi que les usages. Et les infrastructures de production d’électricité françaises, existantes et en projet, seront mises à profit pour produire de l’hydrogène à faible empreinte carbone. Depuis plusieurs années, l’industrie a vu naître et grandir les procédés de fabrication additive, qui tendent à s’imposer grâce aux solutions techniques qu’ils offrent. Ces procédés permettent de nombreuses possibilités en termes d’optimisation topologique tout en raccourcissant les cycles de développement et de production des pièces. À ces nombreux avantages, sont associés un certain nombre de contraintes et de verrous techniques. La présence de défauts surfaciques et/ou internes sont les raisons principales des risque de défaillance des pièces métalliques fabriquées par fusion de poudre et sujettes à des sollicitations mécaniques répétées. La résistance en fatigue des composants produits par ces procédés de fabrication additive par poudres peut encore être grandement améliorée. L’hydrogène, utilisé jusqu’à présent pour des applications industrielles (métallurgie, raffinage, chimie, verre), est produit en grande majorité dans des unités de steam-reforming de gaz naturel, avec rejet fatal de CO2. Son développement comme vecteur d’énergie va nécessiter des investissements considérables pour développer des structures industrielles de production à faible empreinte carbone. La production par électrolyse d’eau apparait comme la voie la plus pertinente, pour autant que ces électrolyseurs soient alimentés avec de l’électricité décarbonée. Le prochain congrès de l’A3TS qui se tiendra les 5-6-7 juillet 2023 à Mulhouse sera l’occasion pour les industriels et chercheurs, de partager leurs visions sur ces questions.
Pierre Bruchet, Délégué général A3TS
Dossier : Surfaces et finitions - Technique - Flashback -
N°481 - Mars/avril 2023
Contrôle et mesure : un enjeu de souveraineté pour l’industrie française
Jusqu’à récemment, le contrôle industriel des productions faisait appel à des mesures par échantillonnage, souvent par des méthodes destructives, en extrayant à intervalles réguliers ou aléatoires des pièces de la chaîne de production, pour les envoyer au laboratoire de contrôle. En cas d’écart par rapport aux tolérances, les résultats, obtenus alors avec des délais significatifs, conduisaient alors à intervenir avec retard sur la ligne de production.
La recherche de la compétitivité industrielle, dans un contexte de concurrence internationale exacerbée dans toutes les grandes filières industrielles, passe aujourd’hui par des tolérances de fabrication de plus en plus resserrées en termes de reproductibilité des propriétés géométriques, physiques, fonctionnelles. Les besoins de mesure se sont de facto considérablement accrus et touchent de multiples aspects : dimensions, état de surface ou défauts internes.
Dans le même temps, l’accélération du développement de technologies de mesure — technologies non destructives reposant souvent sur des mesures optiques, électriques ou électromagnétiques sans contact (UV, rayon X ou laser), avec des temps de réponse très courts, capteurs autonomes et communicants, traitement informatique de masses considérables de données acquises en temps réel, algorithmes d’intelligence artificielle couplant phénomènes physiques et apprentissage — a permis de générer des solutions de diagnostics en temps réel, de détecter des dérives avant que celles-ci ne se traduisent sur des défauts qualifiés en fin de ligne. Et de contribuer à l’optimisation de la production. Sont ainsi mises à disposition des opérateurs et des systèmes automatisés de pilotage de production des influx d’informations de plus en plus nombreuses et diversifiées au fur et à mesure que des capteurs sont intégrés à de multiples étapes de la production et alimentent, en temps réel, un système de supervision et de contrôle doté de capacités d’analyses avancées. Il ne s’agit pas tant de tout automatiser que de fournir des data préanalysées à l’attention des équipes d’exploitation et/ou de maintenance leur permettant de prendre les bonnes décisions. On touche là un levier essentiel de productivité et de compétitivité.
Dans une période ou l’industrie peine à recruter, l’introduction des solutions technologiques de contrôle, de mesure et d’interprétation de données industrielles, composantes pivot de l’usine numérique, constitue aussi un formidable atout pour rehausser l’image de l’industrie auprès des jeunes. Par ses compétences académiques, en particulier dans le domaine de l’optique et des mathématiques appliquées, la France dispose d’atouts de premier plan pour faire émerger des acteurs leaders dans ce domaine. Nombreuses sont les start-ups qui émergent çà et là pour proposer des solutions innovantes : mesure sans contact d’épaisseurs de revêtements de surface ou de couches fonctionnelles, caractérisation des états de surface ou détection de défauts dans la microstructure interne de pièces mécaniques.
Il s’agit là d’un enjeu de souveraineté dans la compétition industrielle internationale. L’une des clés réside dans l’approche en réseau entre laboratoires de recherche, start-up et grands groupes couplée à des financements pour créer des leaders technologiques de taille internationale.Pierre Bruchet, délégué général A3TS
Dossier - Technique - Flashback -
N°480 - Janvier/février 2023
Les traitements de surface au-devant de la scène ?
À deux ans de l’échéance de septembre 2024, les impacts de la réglementation Reach sur les usages des sels de chrome VI avancent à bruits faibles. Pourtant cette date marquera la fin des autorisations du consortium CTAC sub, et donc l’interdiction réglementaire de l’utilisation de ces sels sans nouvelle autorisation pour de nombreux donneurs d’ordres et applicateurs. Deux ans, c’est à la fois très long et très court, surtout si l’on doit déposer un dossier d’autorisation à l’ECHA. Différentes stratégies se font jour mais où en est-on techniquement ?
Les journées A3TS dédiées au remplacement des traitements de surface à base de CrVI ont donné le « la » ; des avancées, mais pas de solutions univoques et universelles pour les applications les plus difficiles. Concernant le chrome dur industriel, des avancées significatives ont été obtenues avec les traitements électrolytiques à base de CrIII, mais ceux-ci présentent encore des limitations en performances pour certaines applications. Par ailleurs, les grands secteurs industriels utilisateurs (automobile par exemple) n’ont pas encore basculé définitivement sur ces technologies. Des solutions alternatives par voie sèche couvrent certaines applications, aéronautiques en particulier.
Concernant les conversions sur alliages d’aluminium, seules les industries aéronautiques, électroniques et de défense sont encore impactées. Les conversions à base de CrIII/Zr sont en évaluation ou sont qualifiées sur certaines nuances, mais pas pour toutes. En fonction de la provenance de l’alliage, de la conversion CrIII/Zr évaluée et de la gamme de traitement de l’applicateur, on observe des divergences parfois sensibles dans les performances obtenues ; et ce même avec l’Alodine1200.
Pour ce qui est du cadmium bichromaté, il a été substitué pour une grande majorité des applications (Zn, ZnNi, Zn lamellaire…). Pour autant, pour l’un de ses usages emblématiques qu’est la connectique, le CMG (Connectors Manufacturers Group) a demandé et obtenu une autorisation d’usage de 12 ans (septembre 2029) à l’ECHA. Ces quelques exemples montrent que la réglementation Reach n’est pas encore de l’histoire ancienne. Au-delà des risques réglementaires, nous pouvons également évoquer les risques économiques liés à la flambée des prix des matières premières. Le zinc nickel, qui a majoritairement remplacé le zinc et le cadmium électrolytiques, pourrait bien se voir remis en cause par le coût du nickel. Par ailleurs, certains donneurs d’ordres n’ont pas qualifié cette alternative et le classement des sels de nickel en annexe XVII de Reach n’est peut-être que provisoire.
D’autres axes de développement pourraient concerner les traitements de surface à court ou moyen terme comme la fabrication additive, les traitements de surface conducteurs ou encore les « revêtements intelligents ». Ce petit panorama met en lumière que les traitements de surface ont toujours été et resteront probablement encore longtemps une composante majeure de l’amélioration des propriétés fonctionnelles des matériaux. Les difficultés de substitution et/ou d’innovation dans ce métier trouvent sans doute leur explication dans une citation de Wolfgang Pauli : « Dieu a créé le volume et le diable la surface ».Gilles Cholvy, Expert en ingénierie des surfaces, IFS Consulting
Profession - Dossier : Matériaux et procédés - Technique - FlashBack -
N°479 - Novembre/décembre 2022
Les traitements de surface au-devant de la scène ?
À deux ans de l’échéance de septembre 2024, les impacts de la réglementation Reach sur les usages des sels de chrome VI avancent à bruits faibles. Pourtant cette date marquera la fin des autorisations du consortium CTAC sub, et donc l’interdiction réglementaire de l’utilisation de ces sels sans nouvelle autorisation pour de nombreux donneurs d’ordres et applicateurs. Deux ans, c’est à la fois très long et très court, surtout si l’on doit déposer un dossier d’autorisation à l’ECHA. Différentes stratégies se font jour mais où en est-on techniquement ?
Les journées A3TS dédiées au remplacement des traitements de surface à base de CrVI ont donné le « la » ; des avancées, mais pas de solutions univoques et universelles pour les applications les plus difficiles.
Concernant le chrome dur industriel, des avancées significatives ont été obtenues avec les traitements électrolytiques à base de CrIII, mais ceux-ci présentent encore des limitations en performances pour certaines applications. Par ailleurs, les grands secteurs industriels utilisateurs (automobile par exemple) n’ont pas encore basculé définitivement sur ces technologies. Des solutions alternatives par voie sèche couvrent certaines applications, aéronautiques en particulier.
Concernant les conversions sur alliages d’aluminium, seules les industries aéronautiques, électroniques et de défense sont encore impactées. Les conversions à base de CrIII/Zr sont en évaluation ou sont qualifiées sur certaines nuances, mais pas pour toutes. En fonction de la provenance de l’alliage, de la conversion CrIII/Zr évaluée et de la gamme de traitement de l’applicateur, on observe des divergences parfois sensibles dans les performances obtenues ; et ce même avec l’Alodine1200.
Pour ce qui est du cadmium bichromaté, il a été substitué pour une grande majorité des applications (Zn, ZnNi, Zn lamellaire…). Pour autant, pour l’un de ses usages emblématiques qu’est la connectique, le CMG (Connectors Manufacturers Group) a demandé et obtenu une autorisation d’usage de 12 ans (septembre 2029) à l’ECHA.
Ces quelques exemples montrent que la réglementation Reach n’est pas encore de l’histoire ancienne.
Au-delà des risques réglementaires, nous pouvons également évoquer les risques économiques liés à la flambée des prix des matières premières. Le zinc nickel, qui a majoritairement remplacé le zinc et le cadmium électrolytiques, pourrait bien se voir remis en cause par le coût du nickel. Par ailleurs, certains donneurs d’ordres n’ont pas qualifié cette alternative et le classement des sels de nickel en annexe XVII de Reach n’est peut-être que provisoire.
D’autres axes de développement pourraient concerner les traitements de surface à court ou moyen terme comme la fabrication additive, les traitements de surface conducteurs ou encore les « revêtements intelligents ».
Ce petit panorama met en lumière que les traitements de surface ont toujours été et resteront probablement encore longtemps une composante majeure de l’amélioration des propriétés fonctionnelles des matériaux.
Les difficultés de substitution et/ou d’innovation dans ce métier trouvent sans doute leur explication dans une citation de Wolfgang Pauli : « Dieu a créé le volume et le diable la surface ».Gilles Cholvy, Expert en ingénierie des surfaces, IFS Consulting
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