Des médailles en « peau de croco »
La réputation de la Monnaie de Paris vient d’en prendre un sérieux coup. La réglementation Reach ayant interdit le trioxyde de chrome, les médailles olympiques souffrent de craquelures. Au total, plus de 100 médailles défectueuses ont été renvoyées par des athlètes mécontents.
La Monnaie de Paris, chargée de produire les médailles des Jeux olympiques de Paris 2024, est « en pleine crise » selon le quotidien La Lettre. Entre craquelures sur les breloques des olympiades et « départs contraints » de trois hauts responsables, l'institution se retrouve sous pression.
Dans les faits, la Monnaie de Paris se débat avec ses vernis défectueux depuis au moins quinze mois, bien avant le début des JO. Comme l'a révélé La Lettre à l'époque, les ennuis de l’établissement public ont démarré avec son plus gros client étranger, le géant des télécoms Huawei. Le groupe chinois commande régulièrement des médailles du travail, qu'il distribue à ses employés les plus méritants. En octobre 2023, l'industriel a fait part de la déception de ses salariés ayant constaté l'apparition de craquelures et a retourné un lot de plus de 12 000 médailles défectueuses. L'épisode a été mal vécu dans les ateliers, où l'on s'attriste de voir une institution millénaire incarnant la qualité du Made in France à l'international prise en défaut par son puissant client asiatique.
Une partie des salariés y voient les conséquences du plan stratégique lancé en 2019 par Marc Schwartz, directeur de la Monnaie de Paris, plaçant la structure artisanale des médailles sous une grande direction industrielle, aux côtés de l'usine de Pessac (Gironde), spécialisée dans les gros volumes de pièces de monnaie.
Le trioxyde de chrome manque à l’appel
La cause de ces vernis écaillés est visiblement liée à l'insuffisante anticipation d'un changement réglementaire par la direction de l'établissement public. La dernière mise à jour de la directive européenne Reach prévoit l'interdiction d'un composant toxique du vernis maison, le trioxyde de chrome, qu'il a fallu remplacer au pied levé.
Le trioxyde de chrome est en effet utilisé dans les formulations de produits pour le traitement de surface des métaux (galvanoplastie, passivation), la fabrication de catalyseurs, de pigments, comme intermédiaire de fabrication d’autres composés du chrome (dioxyde de chrome).
Faute de temps et de recul pour faire des essais, ce sont les médailles de Huawei, puis celles des Jeux olympiques, qui ont fait les frais des nouveaux produits utilisés. À Paris, l'atelier médailles du quai de Conti se fait désormais accompagner par une entreprise lyonnaise spécialisée dans les processus industriels et les traitements de surface, afin de trouver une solution durable.
Plus de 100 médailles des Jeux olympiques de Paris ont donc été retournées par des athlètes, mécontents des défauts de leurs récompenses. Ces médailles présentent des craquelures et ont été qualifiées de « peau de crocodile », un problème devenu viral sur les réseaux sociaux. « Ces médailles sont superbes quand elles sont neuves, mais elles se détériorent très rapidement » avait déclaré sur Instagram le skateur américain Nyjah Huston, qui avait remporté une médaille de bronze le 29 juillet 2024. Le nageur français Maxime Grousset et l'équipe du 4x100 mètres quatre nages, dont Yohann Ndoye Brouard, ont également exprimé leur frustration.